© Sarah Morris

© Sarah Morris: Midtown, 1998
collection Frac Bourgogne - video still


La perspective du cavalier

Lara Almarcegui
, Lilian Bourgeat, Jordi Colomer, Jonas Dahlberg, Koenraad Dedobbeleer, Peter Downsbrough, Peter Garfield, Didier Marcel, Sarah Morris


Sous le titre "La perspective du cavalier", l'exposition regroupe un ensemble d'oeuvres de la collection du Fonds régional d'art contemporain de Bourgogne. Vidéo, sculpture, installation, photographie organisent dans l'exposition des représentations de l'espace urbain en un ensemble de points de vue, ouvrant depuis le centre d'art des perspectives sur le parc Saint-Léger. Cette traversée entre ville et paysage se déroule comme un long travelling cinématographique dans lequel ces différentes images de la ville montrent son espace, la manière de la regarder, de la parcourir, de la vivre.


Le Parc Saint-Léger Centre d'art contemporain et le Fonds régional d'art contemporain Bourgogne ont conçu une exposition basée sur des oeuvres qui représentent l'espace de la ville, selon des perspectives singulières et avec des moyens très différents. La ville, selon cette exposition, se caractérise tout d'abord par le mouvement. C'est un espace que l'on traverse, un défilé d'images et de points de vue sur la ville contemporaine.


L'exposition s'ouvre sur la photographie de Peter Garfield, "Mobile Home (Hartbinger)" (1999). Un pavillon sans caractère particulier, symbole de l'accès à la propriété, de la stabilité, semble menacé par le projectile. L'oeuvre manifeste par son titre (harbinger signifie précurseur) ce signe avant-coureur qui semble menacer les résidences tranquilles. La présence d'événements destructeurs dans un cours paisible est un élément clé des photographies de cet artiste qui dit critiquer les représentations de bonheur associées à l'architecture pavillonnaire et refléter l'angoisse contemporaine.


Dans le volume central du centre d'art, une pièce supplémentaire a été construite afin de projeter l'oeuvre de Jordi Colomer "Anarchitekton". Il s'agit de quatre vidéos tournées à Barcelone (2002), Bucarest (2003), Brasilia (2003) et Osaka (2004) dans lesquelles un même personnage brandit une maquette d'une construction de chacune des villes. Hommage ou dénonciation, le mystère reste entier à regarder cet homme déambuler dans ces quatre cités si différentes. Pourtant cette course sans fin déplace le regard sur l'espace urbain, pénétré d'une situation étrange, qui le fait basculer dans la fiction, ce que souligne le rouge théâtral des murs de la salle de projection et le choix des chaises.


L'oeuvre "Erhewon" (2000) de l'artiste Koenraad Dedobbeleer suscite également le trouble par le déplacement dans l'exposition de quatre lampadaires. Les tubes rose fluorescent semblent juste s'allumer ou s'éteindre laissant le temps comme suspendu. Les lampadaires ont perdu leur fonction, serrés comme s'ils étaient en conversation, et basculent dans l'absurde. Cette scène déserte (le titre est l'anagramme de nowhere, nullepart) est traversée par "Travelling" (2000) de Lilian Bourgeat, une caméra fixée à hauteur d'yeux qui déplace sur des rails. Le déplacement mécanique de la caméra permet aussi au visiteur de comparer ce qu'il a vu avec ce que lui montre l'image à l'écran. Ce dispositif de l'oeuvre montre le travail de la représentation en train de se faire et crée un effet de distanciation qui ramène le visiteur à sa propre expérience, entre réel et virtuel.


Au fond de la salle, on découvre "ET/C" (2004) de Peter Downsbrough. Ce film vidéo noir et blanc propose un voyage dans des espaces urbains à la fois familiers et inconnus. L'artiste souligne comment leur perception est aujourd'hui démultipliée par les nombreux déplacements, à travers des travelling ou panoramiques pris depuis une voiture ou bien des successions de plans fixes. L'espace se définit comme une suite de contextes différents et non comme une réalité totalement compréhensible à partir d'un point de vue unique.


A l'autre extrémité du centre d'art, la bande son très rythmée du film "Midtown" (1998) de Sarah Morris renvoie immédiatement aux films américains ou aux séries télévisées qui se déroulent dans les rues de New York. Les images sont très frontales, proches de la bidimensionalité des peintures qu'elle réalise par ailleurs. Restant volontairement à la surface des choses, elle propose un prisme de couleurs et de lumières, ainsi qu'un étonnant ballet mécanique.


A l'étage, l'oeuvre "Sans titre" (2003) de Didier Marcel est posée sur un pied tournant, évoquant tout à la fois la présentation d'un objet précieux ou une lampe au design contemporain. Dans cet étrange va-et-vient que l'art construit avec la réalité, Didier Marcel réalise ses oeuvres à partir de ce qui fait déjà image dans le réel. La maquette de la poste de Dijon surgit dans la nuit hors de tout contexte. L'éclairage de la maquette renvoie à cette vie nocturne des villes et produit différents effets de réel de l'objet dans l'espace d'exposition mais aussi en dehors. La salle permet une perspective plongeante sur le reste de l'exposition tout autant qu'elle s'ouvre sur le parc.


L'autre mezzanine présente le parcours de Lara Almarcegui dans la ville d'Amsterdam au cours duquel elle s'est attaché à constituer un guide des terrains vagues. "Wastelands Map Amsterdam, guide to the empty sites of Amsterdam" (1999) présente ces différents lieux auxquels l'artiste s'est intéressée parce qu'ils "ne correspondaient pas à un tracé architectural ou urbanistique". Elle précise: "Ces terrains qui n'ont aucune fonction précise offrent un potentiel énorme. Ce sont des espaces de liberté où tout peut arriver". À la manière dont l'exposition joue de l'implantation du Centre d'art dans le parc, l'oeuvre de Lara Almarcegui rend compte de la porosité des villes et des significations de l'urbanisme.


Texte: Claire Legrand


L'association Nivernaise pour l'Art Contemporain est principalement soutenue par le Conseil général de la Nièvre, avec le concours du Ministère de la Culture et de la Communication (Direction régionale des affaires culturelles de Bourgogne), du Conseil régional de Bourgogne et de la Ville de Pougues-les-Eaux.


Le Frac Bourgogne est soutenu par le Ministère de la Culture et de la Communication (Direction régionale des affaires culturelles de Bourgogne) et le Conseil régional de Bourgogne.


Exposition: 9.1. - 17.4.2005
Horaires d'ouverture: mercredi au dimanche de 14 h à 18 h et sur rendez-vous


Parc Saint-Léger
Centre d'art contemporain
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